La trépignation
Mais avant d'arriver au cinquième service de vin, à la bouteille de légende et à la rédemption d'un souper pour le moins inégal, il nous a fallu subir toute une dégringolade, à nos papilles défendantes.
L'interrogation
La désolation
Sur papier, le service suivant était une bonne idée. J'aurais peut-être juste dû licher le menu. «Déroulé de wapiti en croûte de pistaches moutardée», que ça disait. Moi, j'ai eu droit à un recroquevillé de viande trop cuite en croûte de saveur anisée. Et ni le Clerc Milon ni le d'Armailhac 2005 (des jeunots qui auraient mérité un bon coup de carafe en arrière du collet) n'étaient un match même tolérable. J'ai fait ce qu'on ne devrait jamais faire dans ce genre de soirée: j'ai mangé mes légumes, ignoré le roadkill et bu mes deux verres après. C'est triste.
À ce moment de la soirée, j'étais bien décidée à ignorer le contenu de mon assiette pour me consacrer uniquement à celui de mon verre. Était venu le grand moment, celui où nous pourrions plonger nos pifs bien avant dans le verre pour humer cette bonne vieille odeur de fromage (et oui, c'est bon).
Bien entendu, un carambolage gastronomique n'arrive jamais seul. Étant la dernière servie à ma table, alors que les sept autres convives profitaient déjà d'une généreuse portion de Mouton, moi, j'eus droit à un fond de bouteille, deux misérables onces composées de dépôt et de lie. Il a fallu l'intervention de mon chevalier servant, outré au possible, pour qu'on me verse un vrai verre. J'en ai profité pour subtiliser la bouteille vide, qui irait rejoindre sa petite soeur sur notre tablette de «grands vins dégustés qui ramassent maintenant les poils de chat».
Pour terminer en beauté cet incompréhensible menu, on nous présenta la Baronne Pauline, un sauternes, en format «grand buveur» (juste assez pour un mal de coeur, quoi), accompagnée d'un dessert (oh la bonne idée... not) à l'ananas rôti au girofle et flaque fondue (pardon, parfait) à la cardamome. Nous n'avons pas fini ni l'un ni l'autre. Déçus, nous sommes retournés à nos chambres. Pour topper le tout, il était trop tard pour finir ça pompette dans le spa.
*Pas de maître de chai. Celui-ci, probablement trop occupé à se frotter les mains en rêvant à de riches investisseurs chinois, a été remplacé par deux attachés commerciaux, au demeurant très sympathiques, mais qui sont passés de table en table pour faire un coucou. That's it. (D'ailleurs, je change mon projet de vie «être une princesse» pour «être un riche investisseur chinois».)
N. B. – Si, d'aventure, vous tentiez l'expérience d'une soirée gastronomique avec la SAQ, allez-y en gang de chums. Ça vous évitera d'être assis à côté d'une trentenaire trop bronzée qui flashe des 20 piasses au serveur pour qu'il remplisse son verre et qui, chaudasse après trois services (conséquence du fait numéro 1), cale les fonds de lie de Mouton et s'envoie du sauternes comme du petit-lait.