Il faut dire qu'il y a 20 ans, nous éditions surtout des livres de santé et de spiritualité. Nous ne sommes en librairie que depuis cinq ans, soit depuis mon arrivée, et il y a eu une mutation de la direction éditoriale à ce moment.
Disons qu'en cinq ans, il y a une impression d'abondance dans le secteur des livres de cuisine. En même temps, il faut souvent se défendre, se justifier, car les gens se demandent s'il y a encore de la place pour d'autres livres de cuisine. C'est comme pour le roman policier : est-ce qu'il n'y en a pas déjà trop? Pourquoi en écrire de nouveaux? À cela, je réponds qu'il y a toujours de la place pour des projets différents. Il n'est pas question de copier ce qui se fait déjà. Nous avons la prétention de dire qu'on aime les livres et qu'on apprécie l'objet lui-même, le travail graphique et la photo. Nous essayons de nous renouveler, de trouver de nouvelles avenues.
Le marché du livre de cuisine est de plus en plus compétitif. Pourquoi avoir choisi ce secteur, est-ce une passion pour vous?
D'abord, nous sommes à la fois des gourmands et des amateurs de beaux livres, surtout de livres de photos. Le livre de cuisine est, en fait, un livre de photos qui se vend bien! Prenez Moutarde chou par exemple.
Ensuite, c'est un peu un accident de parcours. En 2009, nous avons publié Le Cuisinier rebelle d'Antoine Sicotte, qui a été un grand succès commercial et critique. Cela a touché une corde sensible chez bien des gens qui avaient peut-être le désir de faire des livres de cuisine d'une autre manière. Plusieurs projets nous ont été proposés, comme celui sur le marché Jean-Talon, et nous avons été incapables de refuser!
Mais nous ne donnons pas que dans la cuisine : nous avons déjà fait paraître quatre romans, et cinq autres sont à venir d'ici deux ans. Nous avons aussi le projet de faire des livres de photos avec une facture visuelle qui se distingue.
Ce qui frappe d'abord, c'est le soin apporté au détail. Quand on connaît les coûts de ce genre de détail et la situation de l'édition en général, pourquoi y tenez-vous?
Parce que nous sommes une petite maison, nous avons une relation privilégiée avec les auteurs. Ils sont impliqués dans tout le processus pour les choix éditoriaux, allant même jusqu'au choix du papier. Oui, nous avons comme tout le monde des considérations budgétaires (il faut être rentable!), mais nous avons à cœur d'offrir à nos auteurs un livre dont ils seront fiers.
Nous profitons aussi de relations étroites avec nos imprimeurs qui nous offrent un service fantastique. L'imprimeur est souvent le mal-aimé de la chaîne du livre, alors qu'il est responsable de la qualité; c'est un partenaire essentiel qui permet de faire un livre qui ressemble aux auteurs, comme celui pour les Touilleurs. Les auteurs sont les meilleurs ambassadeurs d'un livre et ils doivent en être heureux pour en parler avec passion.
Justement, comment en êtes-vous venu à travailler avec les Touilleurs?
Sylvain et François sont venus nous rencontrer il y a un an pour présenter une ébauche de projet. Ils avaient vu nos autres livres et je crois qu'ils étaient à la recherche d'une maison qui pourrait leur offrir quelque chose de différent, un avantage que les grandes maisons n'ont pas forcément malgré leurs moyens. Nous avons pu les convaincre qu'avec notre petite équipe, ils pourraient faire leur livre. Ils ont été impliqués dans toutes les étapes de production, ont assisté à toutes les séances photo et ont eu leur mot à dire sur la grille graphique. C'était très important pour nous.
Comment est né le concept des «60 meilleurs, point final»?
C'est une collection née à partir d'un constat : il y a 30 ans, le monde de l'édition culinaire était différent, il y avait moins de livres et beaucoup de «bibles culinaires». Aujourd'hui, le problème est inverse : le lecteur est submergé d'information, surtout si l'on considère Internet. Comment choisir LA meilleure recette?
Notre promesse, dans cette collection, est bien sûre subjective : il s'agit de notre choix. C'est pourquoi nous avons mis un avertissement au début! Les recettes ont été créées par l'équipe et testées à l'interne. Ce sont des recettes originales avec une twist, présentées de manière intéressante à la fois pour les yeux et pour le ventre.
Même si c’est mal d’avoir un chouchou… de quel livre êtes-vous le plus fier?
Le petit dernier, celui des Touilleurs, me touche beaucoup. Mais Moutarde chou a été un coup de cœur. Je suis tiraillé entre les deux!