En cette journée mondiale de «pouce en l'air pour ton utérus», je voudrais moi aussi souligner ces gens qui, chaque jour, font un travail formidable en cuisine et qui s'adonnent, par la bande, à posséder des attributs les qualifiant comme appartenant au sexe féminin. Je profite de cette journée qui nous est pitchée comme un nonosse égalitaire pour dire qu'il y a des filles merveilleuses dans le domaine de l'alimentation. J'aurais pu choisir une autre journée, sauf que le 8 mars, c'est bon pour les stats.
Mes girls de bouffe
Au panthéon des idoles, tous sexes confondus, elle occupe facilement mon top 3. J'admire depuis longtemps cette «femme/fille de/mère» (arf) qui, héritière d'une longue tradition gastronomique familiale, a réussi à récolter trois étoiles Michelin en remettant sur pied le restaurant de son défunt père. Je l'ai rencontrée une fois (et quelle fois!) et si mon texte commence par «la femme chef la plus célèbre du monde», c'est pour une bonne raison: c'est ce qu'elle est. Elle n'est malheureusement pas le/la chef le/la plus célèbre du monde (ce serait probablement Ferran Adrià ou René Redzepi), alors elle récolte le deuxième meilleur titre, celui où on met de l'avant le fait qu'elle soit femme. C'est mieux que rien, je suppose. Crise féministe à part, c'est une chef au talent extraordinaire, dont la cuisine surprend, émeut et fait spinner le hamster mental.
Elena Arzak
Chef à part entière (mais elle aussi «fille de», on ne s'en sort pas), elle tient avec son père Juan Mari le restaurant qui porte leur patronyme, à San Sebastian. Leur cuisine, hautement gastronomique et d'influence basque, a contribué à placer l'Espagne comme pays du renouveau gastronomique au tournant des années 2000. Si elle a été élue «Meilleure femme chef du monde» (deux ans après Anne-Sophie Pic), elle a pris cet honneur comme un compliment pour son travail, et non pour son sexe. Maman de deux enfants et à la tête d'une équipe composée de beaucoup de femmes, elle fait mentir ceux qui disent que les femmes n'ont pas l'esprit ni le caractère pour travailler dans des restaurants haut de gamme. Kin toé!
Héloïse Leclerc
Je ne me lasserai pas d'admirer la créativité, la force et la volonté dont fait preuve Héloïse, la foodista en mission. Avec son resto-bulle, elle fait sortir Québec des sentiers battus, sans jamais faire passer le spectacle avant son talent en cuisine. J'ai aussi le plus grand respect pour son éthique de blogueuse et la justesse de ses commentaires. Bref, j'ai mon ti-macaron «Héloïse, you go girl!».
Isabelle Plante
Je n'y peux rien, je la trouve tellement adorable! Sympathique, talentueuse et rigoureuse: Isabelle, la «perdante aux Chefs» (issssssh), a tout pour aller loin. Surveiller son parcours culinaire fait partie de mes loisirs de blogueuse.
Mes girls de tête
J'aime les gens qui brassent et qui me brassent. C'est ce que fait Élise, végan assumée et véritable référence dans le domaine de l'éthique animale. Certes, elle ne me transformera pas en végan du jour au lendemain (ni même jamais, je crois bien), mais elle me pousse à remettre en question certains choix alimentaires. C'est bon pour mon bedon, mon frigo, mon portefeuille et ma planète, ça.
Lesley Chesterman
Les critiques de Lesley dans The Gazette me font rire et réfléchir. Même s'il nous arrive de nous «pogner» sur Twitter dès qu'il est question de blogueurs, d'éthique, de marques et de firmes de RP, je la respecte énormément. Elle a une grande gueule et sait s'en servir, non pas pour démolir, mais pour critiquer de façon juste (chose que je ne fais pas) et aussi pour souligner quand c'est bon (une chose essentielle).
Marie-Soleil Michon
La foodie officielle de Ricardo a tout pour elle, ou presque: du goût, du talent à la télé et à l'écrit et une bouille absolument sympathique. Je m'ennuie de son émission La liste (le show préféré des obsessifs-compulsifs) et, même si ça n'a aucun rapport avec l'alimentation, je savoure son animation à C'est juste de la télé. On sent qu'elle aime la vie et la bouffe, sans complexes, et c'est une belle image saine qu'elle nous renvoie.
Mes girls de vin
Comment passer à côté de cette sommelière extraordinaire? Elle qui conjugue talent incroyable, connaissances imposantes et pouvoir de vulgarisation est, à mon avis, une ambassadrice du bon vin idéale. Jamais coincée, avec le propos juste, elle parle de vin à nous rendre la gorge sèche.
Jessica Harnois
Son sourire est si engageant qu'on se verserait un verre immédiatement en la rencontrant. Jessica est à mes yeux l'une des meilleures représentantes de cette nouvelle génération de sommeliers et de sommelières qui se passionnent, au-delà du bon jujus, pour la vigne et ses artisans de façon accessible. Et que dire de son humour! La dernière fois que je l'ai entendue parler (aux Prix du public Desjardins), ça se tapait sur les cuisses.
Mes girls tout court
Impossible de parler de ces femmes qui m'inspirent, me touchent et m'interpellent en cuisine sans parler de ma mamie, à qui j'ai dédié le deuxième tome de Fou des foodies: «J'aurai retenu d'elle, et de ma grand-mère paternelle, la leçon la plus importante de toute: cuisine pour ceux que tu aimes.»
Ma mère
Digne héritière de sa mère, ma mamie Nannie, ma mère est toujours dans tous mes top de femmes inspirantes. Elle-même excellente cuisinière (elle a de qui tenir), elle partage ma passion pour la nourriture. Imaginez-nous toutes les deux dans une épicerie fine... c'est bon pour les affaires! Au-delà du magasinage compulsif, ce qui nous relie, c'est aussi le plaisir de manger avec ceux qu'on aime. Ça adonne bien, on s'aime beaucoup.
Et maintenant?
Un peu de lecture supplémentaire: ce texte de Sylvia Galipeau dans La Presse qui, bien qu'il date de 2011, est encore très pertinent, à mon avis; le débat à Radio-Canada avec Lesley Chesterman sur la raison pour laquelle il y a si peu de femmes dans la haute cuisine gastronomique; cette réflexion d'Alan Richman du New York Times comme quoi les femmes en cuisine sont rebutées par l'attitude macho de leurs collègues.